"lI n'y a pas de calèche ici. Le monsieur n'est pas attendu, dirait-on. Il va maintenant venir en Bukovine avec nous et revenir demain ou le jour après - de préférence le jour après.
Pendant qu'il parlait, les chevaux commencèrent à hennir et à ruer - tellement que le conducteur dût les retenir. Et puis au milieu du choeur de cris poussés par mes compagnons qui se signaient sans pouvoir s'arrêter, une calèche à quatre chevaux arriva derrière nous, sembla vouloir nous dépasser mais s'arrêta à notre hauteur. A la lueur de nos lampes, qui tombaient en plein sur eux, je pus voir que les chevaux, de superbes bêtes, étaient d'un noir de charbon. Les conduisaient un grand homme à longue barbe brune et dont le grand chapeau noir semblait avant tout destiner à dissimuler ses traits. Je ne pus distinguer que l'éclat de deux yeux brillants qui, dans la chiche lueur, paraissaient rouges. Il se tourna vers nous et lança au conducteur:

- Vous êtes en avance, ce soir, mon aml.
- Le Herr Anglais était pressé...
- C'est pourquoi, je suppose, vous vouliez l'emmener en Bukovine? Vous ne pouvez pas me tromper, l'ami. J'en sais trop, et mes chevaux sont rapides.

Il sourit à ses dernières paroles. les lampes éclairèrent une bouche dure, des lèvres d'un rouge vif et des dents pointues aussi blanche que l'ivoire. L'un de mes compagnons se pencha vers son voisin et lui murmura un des vers de la Léonore de Burger:

- Denn die Toten reiten schnell *... ( * car les Morts voyagent vite...)

Bram Stoker faisait ici allusion à "Walpurgis Nacht" ( "la nuit où les morts vont vite"), nuit du 31 avril au 1er mai pendant laquelle les Peuples d'Europe centrale croyaient que le Diable surgit parmi nous, que les morts sortent de leur tombe et que tous les esprits malins viennent tourmenter les imprudents attardés au dehors... 
La Nuit et son obscurité ont cristallisées toutes les angoisses et les peurs de l'espèce humaine. Son mystère, le sentiment d'insécurité qu'elle provoquait (et provoque encore...) ont nourris l'Imaginaire de l'Homme. 

Certaines des créatures qu'il à enfantées se sont définitivement installées dans notre inconscient collectif: Vampires, Loups-Garous, Lutins, Sorcières... Avec de très nombreuses "figures" locales: Goules ou Vrolok, Varka, Korrigans, Banshees ou Stregoica... 
La tradition orale, puis la littérature et enfin le cinéma se sont emparés des frayeurs nocturnes de nos ancêtres... Et ont affinés L'incarnation et la représentation de ces frayeurs au fil des siècles...